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Une nouvelle pierre à l’édifice en matière d’hyperlien

Une nouvelle pierre à l’édifice  en matière d’hyperlien

 

La Cour de Justice de l’Union Européenne ( CJUE) par un arrêt du 9 mars 2021[1] apporte une nouvelle pierre à l’édifice dans la construction de sa jurisprudence en matière d’hyperlien.

La question qui lui était soumise était de savoir si un titulaire de droits d’auteur est en droit de subordonner l’utilisation de son catalogue d’œuvres par un licencié  à la mise en place de mesures techniques contre la transclusion, visant à empêcher l’accès à son catalogue d’œuvres à partir d’autres sites  Internet que celui du licencié.

On rappellera la jurisprudence de la CJUE en matière d’hyperlien 1) avant de présenter son nouvel arrêt 2)° et d’analyser sa portée 3).°

 

1/ La mise en place de lien ne nécessite pas d’autorisation en l’absence de public nouveau

Dans son arrêt fondateur en matière d’hyperlien, l’arrêt Svensson du 13 février 2014[2], la CJUE a considéré que  la mise en place d’un hyperlien pointant vers une œuvre protégée constituait un acte de communication qui ne nécessitait pas l’autorisation des titulaires de droits d’auteur, dès lors que cette communication ne s’adressait pas à un nouveau public, par rapport au public du site d’origine, à savoir celui d’Internet.

Dans ce même arrêt, la CJUE a également jugé qu’il en serait autrement si le site d’origine prenait des mesures techniques  pour restreindre l’accès à son oeuvre afin par exemple de le réserver au public de ses seuls abonnés.

Par la suite, dans l’ordonnance Best Water du 21 Octobre 2014[3], la CJUE s’est prononcée sur la mise en place d’autres types de liens , la transclusion ou en anglais le framing/ l’embed  lequel consiste à afficher sur son site Internet , dans un cadre visible ou non, une page provenant d’un autre site , par la technique de l’incorporation de lien Internet, de telle manière que l’environnement du site sur lequel provient cette page est dissimulée à l’internaute.

La CJUE a jugé que la technique de lien – hyperlien ou transclusion – était indifférente.  Dès lors que l’œuvre n’était pas protégée à l’origine par des mesures de restriction, sa communication par hyperlien ou par la technique de la transclusion  ne constituait pas une communication à un public nouveau.

Néanmoins une incertitude demeurait sur l’étendue des mesures techniques de restriction que pouvaient mettre en œuvre un titulaire de droits d’auteur afin de limiter l’accès à son œuvre sur Internet, en particulier dans le cas où le site d’origine sur lequel l’œuvre était accessible, était ouvert à l’ensemble des internautes, sans abonnement.

 

2/  Des mesures techniques de protection peuvent restreindre l’accès à une œuvre au seul public du site d’origine et interdire la transclusion

La CJUE a jugé qu’un titulaire de droits d’auteur est en droit de subordonner l’utilisation de son œuvre par un licencié à la mise en place de mesures techniques visant à interdire la transclusion,  car à travers cette interdiction l’auteur exprime son consentement à ce que son œuvre soit accessible uniquement depuis le site Internet du licencié.

La CJUE prend soin de préciser qu’il en serait de même, dans le cas où le titulaire de droits d’auteur adopterait lui-même des mesures techniques de protection pour «  restreindre le public de ses œuvres aux seuls utilisateurs du site d’origine ».

La CJUE procède assurément par cet arrêt à un rééquilibrage en faveur des titulaires de droits d’auteur

 

3 Quelle est l’étendue des mesures techniques de protection autorisées ?

Il en ressort qu’un titulaire de droits d’auteur est en droit de mettre en œuvre des mesures techniques de protection  visant à interdire la technique de  la transclusion, de telle sorte que l’accès à son œuvre est limité aux seuls internautes du site Internet d’origine.

A fortiori, nous pouvons en déduire qu’un titulaire de droits d’auteur serait en droit de faire de même en matière d’hyperliens, conformément au principe de neutralité technique ainsi qu’à la jurisprudence antérieure de la CJUE en matière de liens, laquelle a jugé que le type de liens était indifférent.

Néanmoins ces mesures techniques doivent être selon la CJUE des « mesures techniques efficaces », au sens de l’article 6 paragraphe 1 et 3 de  directive  2001/29[4], de telle sorte qu’il soit aisé de vérifier si les titulaires de droits d’auteur ont entendu restreindre l’accès à leurs œuvres aux seuls utilisateurs du site Internet d’origine.

En ce sens, les mesures doivent bien être des mesures techniques de protection  et non  par exemple une simple interdiction dans les mentions légales ou dans les conditions générales d’utilisation d’un site Internet.

 

 


[1]CJUE 9 Mars 2021  Aff C-392/19 – VG Bild Kunst c/ Stiftung reubischer Kulturnesitz

http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=3DE0A3FCC87624FC8AAC254A15CC14B5?text=&docid=238661&pageIndex=0&doclang=FR&mode=req&dir=&occ=first&part=1&cid=4344303

[2]CJUE 13 février 2014 Aff C 466/12  Nils Svensson,Sten Sjögren,Madelaine Sahlman,Pia Gaddc/Retriever Sverige AB,https://eurlex.europa.eu/legalcontent/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:62012CJ0466&from=FR

[3] CJUE  2 octobre 2014 Aff C 348/12 BestWater International GmbHc/Michael Mebes,Stefan Potsch, https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:62013CO0348&from=FR

 

[4] Directive du 22 mai 2001  https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:02001L0029-20171010

Publié le 06/04/2021

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